Par un arrêt très attendu, la Cour de Justice de l’Union européenne a décidé que la France ne pouvait exiger d’Airbnb la possession d’une carte professionnelle d’agent immobilier.
Il s’agissait de se prononcer sur le bien fondé d’une demande de décision préjudicielle, au titre de l’article 267 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, introduite dans le cadre d’une procédure pénale par le juge d’instruction du tribunal de grande instance (TGI) de Paris.
L’Association pour un hébergement et un tourisme professionnel (AHTOP) a déposé une plainte avec constitution de partie civile, pour exercice d’une activité d’entremise et de gestion d’immeuble et de fonds de commerce sans carte professionnelle au titre de la loi française n°70-9 du 2 janvier 1970 (loi Hoguet), pour la période allant du 11 avril 2012 au 24 janvier 2017.
Au soutien de sa plainte, cette association faisait valoir qu’Airbnb ne se contente pas de mettre en relation deux parties grâce à la plateforme éponyme puisque, en outre, elle offre des services complémentaires qui, selon elle, sont caractéristiques d’une activité intermédiaire en opérations immobilières.
A la suite du dépôt de cette plainte, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris avait alors délivré, le 16 mars 2017, un réquisitoire introductif, notamment, pour maniement de fonds pour des activités d’entremise et de gestion d’immeubles et de fonds de commerce par une personne dépourvue de carte professionnelle, en violation de la loi Hoguet.
Airbnb, pour sa part, contestait exercer une activité d’agent immobilier et soulevait ainsi l’incapacité de la loi Hoguet du fait de son incompatibilité avec la directive 2000/31 du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur.
Dans ce cadre, le juge d’instruction du TGI de Paris s’interrogeait sur le point de savoir si le service fourni par Airbnb devait être qualifié de « service de la société de l’information », au sens de cette directive, et dans l’affirmative, si celle-ci s’opposait à ce que la loi Hoguet soit appliquée à cette société dans le litige au principal ou si, au contraire, cette directive ne faisait pas obstacle à la recherche de la responsabilité pénale d’Airbnb sur le fondement de cette loi.
C’est dans ces conditions qu’il avait décidé de surseoir à statuer et de poser à la CJUE les questions préjudicielles suivantes : les prestations fournies en France par Airbnb par le canal d’une plateforme électronique exploitée depuis l’Irlande bénéficient-elles de la liberté de prestation de services prévue par l’article 3 de la directive 2000/31 et les règles relatives à l’exercice de la profession d’agent immobilier en France, édictées par la loi Hoguet, sont-elles opposables et, donc concrètement applicables de manière autoritaire à Airbnb?